février 28, 2017

L’hypnose pour courir : comment ça marche?

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On entend fréquemment dire qu’un marathon se court, certes, avec les jambes, mais surtout avec la tête. Et il suffit de se poster près de la ligne d’arrivée d’une course pour observer que certains finishers sont bien au-delà des limites de leur corps, portés dans les derniers kilomètres par une force puisée « ailleurs », une motivation au-delà de leur seule volonté.

L’hypnose est une technique de plus en plus fréquemment utilisée pour mobiliser des ressources internes inhabituelles, afin d’atteindre des objectifs de toutes sortes. En accompagnement personnel comme en thérapie, on a recours à l’hypnose pour dépasser des blocages, améliorer des comportements ou développer des capacités ou des performances. De là à imaginer que l’on peut utiliser des techniques hypnotiques pour booster la pratique de la course à pied, il n’y avait que quelques foulées, que mes baskets de praticienne en hypnose ont franchi il y a quelques années déjà…

Un Plan d’entrainement pour le mental

Personne ne songe à s’engager sur une course sans préparation physique – en revanche, peu sont ceux qui pensent à travailler leur mental. Celui-ci, pourtant, peut devenir un allié précieux, s’il est bien utilisé.

L’hypnose est souvent comparée à un « mode d’emploi du cerveau » : elle permet de mieux contrôler les fonctionnements internes qui nous échappent habituellement. Ce que nous nommons routines ou comportements automatiques ne sont en réalité que des apprentissages : nous apprenons en permanence, mais nous pensons rarement à orienter cette belle capacité vers ce qui nous est utile ! Ainsi, nous savons parfaitement stresser avant un examen ou une compétition, car notre éducation ou nos expériences de vie nous ont appris qu’un tel évènement peut être source de jugement ou d’échec. Et bien sûr, ce stress limite nos performances, et enfonce ainsi le clou de notre croyance… Le cercle vicieux est en place.

A l’inverse, lorsque l’on étudie le fonctionnement des personnes qui réussissent, en sport notamment, on se rend compte qu’elles capitalisent naturellement sur toutes les expériences qui renforcent leur confiance, et construisent ainsi leurs succès successifs. L’hypnose, et sa variante individuelle qu’est l’auto-hypnose, permettent de mettre en place toutes les stratégies mentales gagnantes : plutôt utile lorsque l’on s’est fixé un objectif, non ?

Se programmer avant, mais aussi pendant et après une course

Il n’y a pas de recette magique : chaque séance d’hypnose est unique, et s’adapte aux objectifs et aux besoins de chacun. Il y a néanmoins des grands thèmes communs à tous les pratiquants de course à pied, sur lesquels on travaille fréquemment.

  • Se motiver et se préparer: cet hiver, en m’entrainant pour le marathon de Barcelone qui a lieu au mois de mars, combien de fois ai-je entendu « Mais comment fais-tu pour trouver le courage d’aller courir dans ce froid ? ». Il ne s’agissait pas de courage, car si j’avais dû lutter contre l’attraction du sofa, ma seule volonté n’aurait pas fait long feu ! Simplement, j’avais mis mon mental en mode « préparation » : en travaillant sur les leviers de motivation qui rendaient ce marathon important, et en créant une routine qui me permettait de chausser les baskets le soir sans vraiment réfléchir, j’ai rendu mes sorties automatiques. Jusqu’à ce que le plaisir et l’envie finissent même par prendre la relève !

Ces moments de plaisir que l’on rencontre d’ailleurs à certains moments de l’entrainement sont autant de graines semées, qui peuvent être réutilisées plus tard si besoin. Ainsi, dès que je me sens bien, je me concentre sur toutes mes bonnes sensations physiques, et je note mentalement le morceau de musique qui passe dans mon iPod. Cette association entre le morceau et le ressenti se nomme un « ancrage » : en cas de coup de mou pendant la suite de l’entrainement, il me suffit de repasser le morceau ancré pour aussitôt retrouver les sensations qui y sont liées.

Avant une course, il est aussi intéressant de « Visualiser l’arrivée ». Pour cela, j’essaie généralement de trouver sur le site web des images de la « finish line », et je m’imagine la franchir, les bras en l’air, à l’issue d’un dernier sprint où sont jetées les dernières forces. Comme pour le Marathon, où j’avais suivi en pensées la « blue line » qui balise le parcours jusqu’à ses derniers mètres, et à laquelle j’ai pu me raccrocher le jour venu, en focalisant toute mon attention sur ce marquage au sol pour détourner mon esprit de toute autre pensée de fatigue ou de douleur.

Enfin, l’hypnose permet aussi de débusquer et chasser les croyances limitantes qui sabotent un objectif sans que l’on ne s’en rende compte. Notre imagination créé notre réalité, et l’on tend à aller dans la direction que prend notre pensée. Ainsi, quand on se dit : « Jamais je n’arriverai à courir 4h d’affilée… », cela revient à mettre en œuvre toutes nos ressources internes pour que cela devienne vrai… Ce qui donne à réfléchir, non ?

  • Se conditionner et se renforcer: nous avons souvent un « seuil » au-delà duquel nous quittons notre zone de confort. Que ce soit après 5, 10 ou 30km, lorsque ce moment arrive et que l’on a l’impression que le corps ne peut plus avancer, c’est là que le « relais mental » prend toute son importance. Soit on se laisse parasiter par la douleur, l’idée de la fatigue et le découragement – soit on parvient à mettre tout cela de côté pour installer, au choix, un silence ou une pensée plus stimulante. Pas simple à réussir sur le moment si l’on n’a pas automatisé la bonne réaction… Pour cela, j’utilise une technique que j’ai surnommé « Pac Man » : telle la boule jaune de mon enfance, j’aime joncher le parcours de « Pac-gommes » qui me redonnent de la force et de l’énergie quand il y en a besoin. Ainsi, en cas de moment difficile, il me suffit de me concentrer sur ma « Pac-gomme » suivante : non seulement cet objectif très court terme détourne mon attention de la distance réelle qu’il reste à parcourir, mais en plus, l’effet « boost » de l’énergie mentalement récupérée me permet de poursuivre…
  • Récupérer et aller de l’avant: lorsque l’on a passé des semaines ou des mois à préparer une échéance importante, il est normal de ressentir une baisse de motivation une fois la course passée. Il est donc important de savoir gérer cet après… pour aller de l’avant !

Soit l’objectif fixé a été atteint, et il faut pouvoir rebondir pour retrouver une motivation à s’entrainer de nouveau.

Soit le résultat n’a pas été celui escompté, et il y a donc un travail de « résilience » à mettre en place pour que ce moment puisse se transformer en expérience qui a quelque chose à nous enseigner, mais qui ne nous empêche pas d’avancer. Ainsi, après un premier marathon couru dans la douleur (prendre le départ avec une grippe n’EST VRAIMENT PAS une bonne idée…), j’ai dû effacer l’ impression de lutte et de souffrance pour aborder la deuxième édition sans être affectée par l’appréhension qui aurait parasité mon entrainement. Du coup, j’ai pu courir ce 2èmemarathon avec un vrai plaisir… que j’ai « ancré » en profondeur, bien sûr !

Soit, enfin, une blessure ou un problème ne permettent pas de prendre le départ, ou obligent à l’abandon, et rendent vaines les heures consacrées à la préparation… Ce renoncement qu’il faut dépasser est nécessaire, il s’apparente mentalement à un travail de « deuil ».

Oui mais… comment y arriver ?

L’hypnose est aujourd’hui répandue, et de nombreux praticiens, coachs ou thérapeutes peuvent accompagner des demandes pour travailler des objectifs précis. Une autre possibilité consiste àapprendre les bases de l’auto-hypnose pour appliquer soi-même les outils les plus utiles. L’avantage, c’est que lorsque l’on apprend ainsi à travailler en collaboration avec son mental, les applications dépassent souvent le seul champ sportif…

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